Long live the TV #7 ! A propos des séries historiques britanniques : « Poldark »

Attention : spoilers (saisons 1 à 4)

Poldark est une série télévisée britannique créée par Debbie Horsfield et diffusée outre-Manche sur la chaîne BBC One depuis 2015. Il s’agit, comme Outlander, de l’adaptation d’une série de treize romans de l’écrivain et scénariste Winston Graham (publiés entre 1945 et 2002), et elle n’est diffusée en France que sur Netflix.

Autant dire que pour ces deux séries de qualité, la chance de sortir de l’anonymat pour ceux qui ne possèdent pas d’abonnement à la chaine payante est fort peu envisageable. D’ailleurs, elle est inédite dans la plupart des pays européens. Il s’agit déjà de la seconde adaptation télévisée des romans de Graham. En effet, vingt-quatre épisodes avaient déjà vu le jour à la télévision britannique entre 1975 et 1977, diffusés avec succès sur BBC (peu d’informations sur cette série sont disponibles).

J’avais entendu du bien de Poldark avant de regarder la série (ma copine Marie, encore !), sans même en connaître le sujet, si ce n’est son appartenance à la longue liste de séries télévisées abordant l’Histoire de l’Angleterre.

Après avoir visionné le pilote, j’ai été quelque peu déconcertée. En effet, bien que les acteurs soient à la hauteur de la tâche, la réalisation manque de peps et, malheureusement, l’insuffisance (probable) de moyens financiers de la série se fait un peu ressentir. Ces quelques défauts d’ordre visuel ou de mise en scène s’atténuent vite une fois pris dans le flot du récit et la qualité semble s’être améliorée au fil des saisons. J’ai ensuite dévoré les épisodes aussi vite que j’ai pu et j’ai attendu la saison 4 avec impatience !

Cette fois-ci, c’est dans les Cornouailles que l’action se déroule, ce qui a deux principales conséquences : des décors naturels à couper le souffle, mais aussi la présentation d’un pan de l’histoire anglaise particulier (et localisé). En effet, le récit aborde les conditions sociales des habitants de la région, à la fin du XVIIIème siècle.

En découle des intrigues plus axées sur les classes sociales, leurs difficultés et leurs différences, que sur l’histoire du pays dans sa globalité. La toile de fond est néanmoins bien historique puisque tout commence par le retour du héros en Cornouailles, Ross Poldark (Aidan Turner), après avoir combattu durant la Guerre d’indépendance en Amérique (1775-1783). La région, et le pays entier, peine alors à se relever des conséquences économiques de cette guerre.

Je dois bien avouer qu’Aidan Turner est parfait pour ce rôle de rebelle, à la personnalité complexe : il est la fois aussi sauvage et imprévisible que la région où il a grandi et tiraillé entre son statut social élevé et sa proximité avec le peuple.

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En effet, le Capitaine Poldark est issu de l’aristocratie, mais son héritage, outre son nom, repose uniquement sur une petite propriété en déclin, Nampara, et une mine laissée à l’abandon. En revenant de la guerre, le visage balafré, il découvre non seulement que son père est décédé, mais que sa promise de longue date, Elizabeth (Heida Reed) est fiancée à un autre, son cousin, Francis Poldark (Kyle Soller), héritier du domaine familial de Trenwith.

Loin de s’apitoyer sur son sort, il se remonte alors les manches et prend en main son domaine. Sa vision plutôt révolutionnaire de la gestion de ses terres et ses bons rapports avec ses métayers font rapidement de lui une figure de proue du village, au grand désarroi du méchant de l’histoire (qu’on adore détester) : George Warleggan (Jack Farthing). Ce parvenu peu scrupuleux, petit-fils de forgeron, a grimpé les échelons en écrasant et ruinant la concurrence, avec l’aide de son oncle, aussi désagréable et misanthrope que lui. Dire qu’il prend Ross en grippe dès son retour est un euphémisme. En réalité, à partir de ce moment, George dédie sa vie à faire de celle de Ross un enfer, non sans une certaine réussite.

Les seconds rôles sont très justes et les réactions impulsives du héros et son caractère irascible sont heureusement tempérés par la douceur de plusieurs femmes qui l’entourent, comme sa pétillante cousine Verity (Ruby Bentall), la douce Elizabeth, mais aussi son aide de cuisine puis épouse, Demelza (Eleanor Tomlinson).

Malgré les difficultés de leur couple, notamment liées à leur différence de statut (mais aussi à leur caractère bien trempé), Demelza et Ross semblent parfaits l’un pour l’autre et elle sait le remettre à sa place au besoin.  C’est d’ailleurs mon coup de cœur incontesté de la série ! La douceur de ses traits contraste avec son coté sauvageonne (au début de la série) et son bon cœur n’a d’égal que sa détermination.

Je ne connaissais pas l’actrice, mais son interprétation m’a enchantée, pourtant son rôle est loin d’être simple. L’émancipation féminine est en effet esquissée dans la série à travers ce personnage et contribue à la critique plus globale des différences de statuts (riches/pauvres, hommes/femmes) à une époque en perpétuelle évolution et dans une région touchée de plein fouet par les retombées de la guerre.

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Outre le drame familial, Poldark évoque donc bien une critique sociale et politique forte, dont le héros est le porte-drapeau, notamment grâce à son éloquence sans faille et son besoin irrépressible de défendre les plus pauvres. En misant sur ses terres, qu’il cultive et entretient lui-même, Ross parvient à établir une relation de confiance avec le peuple.

Faisant fi des conventions et des classes sociales, il épouse sur un coup de tête Demelza, qu’il a sauvée de la rue, emprunte de l’argent à la banque pour tout miser sur sa mine et s’entoure de gens de confiance avec qui il travaille comme un acharné. Tous ses choix, qui peuvent paraître irréfléchis, le mènent à envisager sa vie de manière bien différente par rapport à ceux de sa classe, qui préfèrent les soirées et les ragots au dur labeur. Toutefois, même s’il y répugne, il est forcé d’évoluer aussi dans les hautes sphères, puisque c’est évidemment là que se prennent les décisions et qu’il peut tenter de faire changer les choses.

Mon bilan :

Si on peut comparer Poldark à Outlander sur certains points, comme les sublimes thèmes musicaux et les magnifiques paysages, il existe une différence notable de mise en scène et de réalisation entre les deux séries. En effet, Poldark est plus proche de la tradition des films ou séries historiques (period drama, costume drama).

La mise en scène est plus « classique », mais ce n’est pas une mauvaise chose, car il est plutôt rare qu’une série parvienne à cette qualité tout en rendant hommage au patrimoine anglais, car, je le rappelle, la tradition des period dramas est très importante outre-Manche. Les sujets abordés sont suffisamment variés pour capter l’attention du spectateur et le laisser scotcher derrière son écran. Encore faut-il apprécier le genre. À voir absolument si on est fan de l’Angleterre sauvage, de Jane Austen, d’Emily Brontë ou de Charlotte Brontë et des adaptations de leurs romans !

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