Critique : « Mignonnes » de Maïmouna Doucouré (2020) : Un Film Qui Pose Les Bonnes Questions

Après le scandale autour de la vignette de ce film sur Netflix USA, et après son interdiction de diffusion sur la plateforme en Turquie, ma curiosité a suffisamment été piquée pour me remotiver à aller au cinéma malgré les restrictions de distanciation sociale et du port du masque pendant toute la durée de la projection. Et spoiler : c’est pas si pire le cinéma avec un masque !

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Mignonnes (2020) suit Amy (Fathia Youssouf) une pré-adolescente de 11 ans cherchant à s’intégrer dans un groupe de jeunes filles de son âge qu’elle prend en admiration.

Cette admiration se transforme presque en obsession ce qui la pousse à copier leur façon de s’habiller et de se comporter afin d’être acceptée. En somme, ce film raconte le rite de passage du collège : le moment où on devient « grand.e » sans vraiment savoir ce que ça veut dire, le moment où on remet en question l’environnement familial pour se tourner vers les autres.

Puisque les personnages principaux sont de jeunes filles, l’accent est bien entendu mis sur le changement d’univers pour les pré-adolescentes et non pour les pré-adolescents.

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La femme dans notre société a (heureusement) une multitude de représentations, ce qui parfois peut rendre difficile la tâche de trouver un modèle pour une jeune fille.

Les réseaux sociaux influencent énormément nos vies et encore plus celles des jeunes générations qui cherchent à développer leur propre image, leur « brand ».

Alors, lorsque les contenus les plus visionnés et aimés sont des vidéos de femmes hyper-sexualisées dansant de façon plus que suggestive, quoi de plus naturel pour une fille de 11 ans que de copier ces femmes pour gagner un concours de danse et être appréciée à sa juste valeur ?

La rhétorique est bonne. Afin de montrer le parallèle entre les clips musicaux avec des femmes dansant de manière à éveiller un certain désir et la façon dont « les mignonnes » préparent leur compétition, leur danse est filmée en suivant les mêmes codes : des zooms sur leurs fessiers et leurs seins, un plan sur deux.

Comme invitée à se mettre dans la peau d’un.e pédophile, le malaise dans l’audience est bien présent tout au long de ces séquences. 

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Le coup de maître de Maïmouna Doucouré est d’avoir réussi à parler de l’hyper-sexualisation des pré-adolescentes en n’accusant ou en ne critiquant personne en particulier mais que tout le monde se sente tout de même concerné à la fin.

Elle met simplement en lumière des points qui dérangent et nous demande de réfléchir à la situation. Une multitude de questions se précipitent donc dans nos têtes en sortant de la salle et trouver leurs réponses n’est pas si aisé.

On s’interroge sur la place et le rôle des adultes dans la vie des pré-adolescent.e.s, sur l’écart des mondes qu’il y a entre les parents et les enfants, sur l’éducation et la culture religieuse et, surtout pour ma part, sur la liberté d’expression.

En tant que femme de moins de 30 ans, je me retrouve souvent à avoir de longues discussions sur la liberté de la femme avec différentes générations : la liberté de s’habiller comme on le souhaite, la liberté d’avoir des relations sexuelles avec qui on veut, la liberté de croire en une divinité ou non, la liberté de vivre sa vie comme on l’entend.

La grande question qui se pose maintenant à moi est : jusqu’où notre liberté peut aller sans entraver le droit à l’innocence des enfants ?

Ce qui mène à une deuxième question : à quel point sommes-nous responsables de l’éducation des jeunes générations qu’elles soient apparentées à nous ou non ?

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Chacun.e retirera un gros questionnement de Mignonnes (2020) de Maïmouna Doucouré qui lui sera personnel, mais la réponse mériterait d’être cherchée en échangeant tou.te.s ensemble.

Astrid Kaisermann

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